Les sujets à éviter
Il y a quelques années, j’étais à table avec quelques personnes, dont un négationniste des changements climatiques avec qui j’avais eu quelques discussions orageuses. Mais ce soir-là, son vis-à-vis était un Suisse. Aux arguments litigieux, il répondait simplement par des «hum, hum». En quelques minutes seulement, toute controverse avait disparu. Sans débat, sans polémique, sans querelle, sans affrontement. La manœuvre m’avait beaucoup impressionné. J’y avais vu les fondements de la neutralité suisse : laisse parler et fais à ta tête!
Depuis, il m’arrive parfois d’adopter la stratégie helvète, toujours avec succès. Et pourtant, j’ai du mal à m’y tenir. J’ai un esprit plutôt français. J’adore discuter, j’ai une grande gueule et des opinions que certains pourraient qualifier de tranchées. La neutralité, ce n’est pas vraiment ma tasse de thé ou plutôt mon tonnelet de schnaps, pour employer une image plus suisse. Ce qui me cause bien des ennuis au royaume de la ceinture fléchée.
Chez nous, on peut dire ce qu’on veut, mais à condition de dire la même chose que les autres. À Tout le monde en parle, par exemple, on peut dire n’importe quoi (et certains ne s’en privent pas), mais à condition d’être nationaliste, d’être de gauche et d’aimer Fred Pellerin. Si par malheur tu n’es ni l’un ni l’autre et que les contes de Fred te font bâiller, tu ne seras pas accueilli au sein de la tribu.