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Archives de octobre, 2019

Le premier roman de Rima

Avant de vous parler du premier roman de Rima Elkouri, je vais être honnête avec vous : j’ai beaucoup d’affection pour mon ex-collègue. J’ai d’ailleurs joué un petit rôle dans sa venue à La Presse. Au terme du stage d’été, je trouvais qu’il aurait été stupide de laisser filer un aussi beau talent. Aussi ai-je convaincu mes patrons de lui offrir un poste et persuadé Rima de ne pas accepter l’offre de Radio-Canada. Quand elle a été nommée chroniqueuse quelques années plus tard, malgré son jeune âge, un cadre m’a dit : « Je n’ai rien contre Rima, mais qu’est-ce qu’elle va faire quand elle aura 40 ans ? » J’aurais pu lui répondre : « Elle écrira des livres. »

Cinq ans après « Pas envie d’être arabe », la voilà qui publie son premier roman « Manam ». Dans ce récit, apparemment inspiré par la vie de la grand-maman de l’autrice, une enseignante profite d’un congé scolaire pour se rendre à la frontière de la Turquie et de la Syrie dans l’espoir de faire resurgir le passé de sa famille. Elle nous amène peu à peu, à travers ses recherches et ses rencontres, à découvrir toute l’horreur du génocide arménien, que la Turquie s’entête à nier, un siècle plus tard.

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Jolin-Barrette et le « bonjour-hi »

Il faut croire que le succès de la loi 21 est monté à la tête du ministre Simon Jolin-Barrette. Voilà que l’homme qui a fait disparaître, à coup de clause dérogatoire, hidjabs, kippas et turbans des écoles, veut interdire le « bonjour-hi ». Cette formule d’accueil typiquement montréalaise avait déjà été condamnée il y deux ans par l’Assemblée nationale elle-même. Qui plus est à l’unanimité.

Le ministre responsable de la Langue française envisage maintenant de rendre le « bonjour-hi » illégal. Son usage sera-t-il passible d’une amende ? D’une peine de prison ? Les fautifs seront-ils condamnés à la déportation à Toronto ? À la torture ? Attendons. Le politicien-qui-ne-doute-de-rien nous promet « des mesures au cours des prochains mois ».

Le Mouvement Québec français a évidemment applaudi, ce qui n’est pas bon signe. Cela dit, je sais que bien des Québécois francophones, pourtant plus modérés, détestent eux aussi cet accueil bilingue qu’ils voient comme un symbole de l’anglicisation de Montréal.

Pour ma part, comme je l’ai écrit il y a deux ans déjà, je ne m’offusque pas de ce « bonjour-hi ! » si représentatif de notre métropole multiculturelle. « Bonjour, Hi ! », écrivais-je, ça veut juste dire : « Je peux vous servir en français ou en anglais. » Et dès que vous répondez « Bonjour ! », la conversation se poursuit habituellement en français.

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Affaire ukrainienne : « quid pro quo », une mauvaise traduction

Dans l’affaire ukrainienne qui pourrait mener à la destitution de Donald Trump, les médias anglophones utilisent fréquemment l’expression « quid pro quo ». Le président américain a-t-il, oui ou non, commis un « quid pro quo » lors de son appel avec le président Volodymyr Zelensky ?

L’ennui, c’est que cette expression-là, même si elle est parfois employée en traduction, n’a aucun sens en français. On trouve bien dans notre langue le mot « quiproquo », mais il désigne une « erreur qui consiste à prendre une personne, une chose pour une autre » ou encore la « situation qui en résulte ». Ce n’est manifestement pas de cela qu’il s’agit.

La locution « quid pro quo », empruntée par l’anglais au latin, désigne plutôt un « service obtenu en contrepartie, en échange de quelque chose ». Dans le cas qui nous occupe, le « quid pro quo » de Trump peut donc se traduire par un service (une enquête de l’Ukraine sur les Biden) obtenu en échange de fonds accordés à ce pays. Autrement dit, le président républicain, tel un chef mafieux, a-t-il « forcé la main » d’un dirigeant étranger pour obtenir une enquête susceptible de nuire à un rival démocrate ? C’est ce que les démocrates tenteront de prouver.

On pourrait aussi croire, dans la mesure où l’Ukraine y trouve son compte (les 391 millions promis par les États-Unis ayant été débloqués), qu’il s’agit de ce qu’on appelle en français un « échange de bons procédés ». Dans son article du jour sur l’affaire, Le Monde parle de « donnant-donnant » et de « troc ». Et si l’on trouve ces traductions trop neutres, on pourrait choisir « chantage diplomatique ».
  •  Trump a-t-il exercé un chantage diplomatique sur Zelensky ?
  •  Trump nie tout troc avec Zelensky.
Comme on le voit, le français ne manque pas de ressources pour traduire « quid pro quo ».

« Downton Abbey » et « Judy » plutôt décevants

L’ultime bal de «Downton Abbey».

Désolé, mais je n’ai pas de films passionnants à vous conseiller cette semaine, même si l’affiche paraissait alléchante. Commençons par « Downton Abbey ». Les aficionados ont adoré : la note atteint 95% sur le Tomatometer et 8,6 étoiles sur Cinéma Montréal. Ça fait beaucoup d’applaudissements. Tant mieux pour les artisans de la célèbre série, qui ont réussi leur pari : le film connaît un grand succès.

Pour ma part, je les préférais à la télé, les élégants personnages de cette maisonnée aristocratique de la campagne anglaise. Bien sûr, on retrouve au grand écran tous ceux-là qu’on a aimés au petit. Mais l’intrigue retenue (la visite du couple royal au domaine) est un peu faiblarde. Il faut dire qu’il était difficile de trouver une histoire qui réunirait tous les principaux personnages des six saisons. On y est parvenu, mais en sacrifiant à la finesse qui en faisait précisément le charme. Pendant la première demi-heure, qui s’étire sans jamais vraiment démarrer, je me suis même franchement ennuyé. Le film ne trouve son rythme que dans la seconde partie, plus enlevée.

Cela dit, le long métrage de Michael Engler offre un dernier tour de piste aux vedettes de la série, disparues trop vite pour nombre de leurs fans, restés nostalgiques. Le grand bal qui clôt le tout est une splendeur. À condition d’oublier cette apologie à peine déguisée de l’aristocratie et de la royauté, on pourra admirer sur grand écran et pour l’ultime fois les robes somptueuses de lady Mary et de lady Edith.

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