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Qu’est-ce que l’« extimité » ?

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Savez-vous ce qu’est l’extimité ?  Le mot a été forgé par Jacques Lacan en 1969 en opposition au terme intimité. Le psychanalyste définissait cette notion comme l’« extériorité intime ». « Elle visait initialement, peut-on lire dans Le Monde, à souligner l’absence de rupture entre espace public et espace privé. »

Aujourd’hui, le terme a été repris pour décrire le dévoilement de « son espace intime sur les réseaux sociaux ». Depuis 2007, par exemple, je raconte ma vie dans les Carnets de Paul Roux. Récemment, j’ai parlé de notre anniversaire de vie commune, à Lise et à moi, ainsi que de mes 79 ans. En faisant ainsi part de mon intimité à mes lecteurs, je fais de l’extimité.

Bonne nouvelle : s’exposer sur Facebook, Instagram ou TikTok peut avoir des effets thérapeutiques. C’est ce que prétendent, en tout cas, certains psys. Cela permettrait d’assumer sa personnalité face aux normes sociales. Selon le psychiatre Serge Tisseron, le désir de se raconter serait en effet inhérent à l’humain ; il pourrait notamment améliorer l’estime de soi.

Après 17 années de carnets, j’ai tendance à le croire. J’ai l’impression d’avoir beaucoup gagné en confiance.

Bien entendu, cette quête d’authenticité, pour être bénéfique, ne doit pas tomber dans l’artificialité ou la superficialité.

Les jours heureux : exigeant et réussi !

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Sophie Desmarais dans Les jours heureux.

Le dernier film de Chloé Robichaud n’est pas un film sur la musique. C’est d’abord l’histoire d’Emma, jeune et talentueuse cheffe d’orchestre qu’on découvre au cours d’une période-charnière de sa vie. Mais la musique, qui va de Mozart à Malher en passant par Schoenberg, témoignera de son évolution.  La jeune femme progressera sur le chemin de son autonomie en s’attaquant à des œuvres aux émotions fortes et violentes.

Dans le rôle principal, Sophie Desmarais, une comédienne à l’aise dans tous les genres, est encore une fois remarquable. On raconte qu’elle s’est entraînée fort avec Yannick Nézet-Séguin pour incarner une cheffe d’orchestre crédible. Mission accomplie. L’actrice pousse le souci du détail jusqu’à être capable de dissocier la gestuelle de ses deux mains, comme le font les vrais chefs. Le reste du rôle n’en est pas moins terriblement exigeant, Emma devant évoluer dans une liaison amoureuse compliquée et une relation parentale toxique, notamment avec son père. Encore là, mission accomplie.

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À la défense de l’Extra de Tou.Tv

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Invité à Tout le monde dit n’importe quoi, dimanche dernier, Claude Meunier a critiqué vertement la décision de Radio-Canada de présenter les six nouveaux épisodes de La petite vie à l’Extra d’Ici Tou.Tv avant de les diffuser à la télé publique. L’auteur-comédien n’est pas le premier à critiquer la priorité parfois accordée à cette chaîne en continu. En tant qu’abonné un brin agacé par ces attaques, j’aimerais présenter un point de vue différent.

Je ne connais pas les chiffres exacts, mais nombreux sont ceux qui, tout comme moi, abandonnent le câble, préférant la diffusion en flux, mieux connue sous l’appellation streaming. Sans doute pour ne pas laisser tout le monde s’envoler vers Netflix ou Crave, Radio-Canada a créé sa propre plateforme : Ici Tou.Tv, dont l’Extra offre quelques primeurs. On peut s’y abonner pour 6,99 $, une fraction de ce que demandent les autres diffuseurs. Bref, c’est le meilleur rapport prix/qualité sur le marché.

Est-ce que cette modique somme fait de nous des privilégiés, en marge du grand public ? Si privilège il y a, il est bien relatif. Je tiens à préciser, en effet, que je ne voyage pas en jet privé (je n’ai même pas pris l’avion depuis plus de trois ans). Je ne suis pas invité aux soirées de Bill Gates ou de Jeff Bezos. Je ne vais pas non plus chasser ou pêcher dans le Grand Nord en hélicoptère. Je n’ai même pas d’auto.

Rappelons le prix : 6,99 $, l’équivalent d’un cappuccino dans nos cafés chics. Est-ce si terrible ? Ne mérite-t-on pas, à l’occasion, une primeur ? Moi, en tout cas, j’aime bien en profiter. J’ai vu en trois jours les dix épisodes de La candidate. Un bijou de série ! Et les sept nouveaux chapitres de Lupin terminés, en deux jours, je m’apprête à me lancer dans La petite vie. J’ai bien hâte. Je vous en reparle bientôt.

Changement ou dérèglement climatique ?

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Image par Gerd Altmann de Pixabay

Dans son nouveau texte consacré à l’environnement, le pape François parle du dérèglement climatique. Cette expression me paraît beaucoup plus juste que « changement climatique », qu’on entend habituellement.

En français, le mot « changement » est neutre. Il décrit simplement le fait de changer, de se modifier. On peut changer en bien ou en mal. Un changement, si l’on se fie au Grand Robert, peut se traduire par une augmentation comme par une diminution. Il peut engendrer une amélioration comme une détérioration, un renouvellement comme un bouleversement, une innovation comme une altération.

Qu’on utilise la location au singulier ou au pluriel, les changements qui affectent notre « maison commune », comme l’appelle le pape, n’ont rien de positif. « Nul ne peut ignorer, écrit François, que nous avons assisté ces dernières années à des phénomènes extrêmes, à de fréquentes périodes de chaleur inhabituelle, à des sécheresses et à d’autres gémissements de la Terre qui ne sont que quelques-unes des expressions tangibles d’une maladie silencieuse qui nous affecte tous. »

C’est pourquoi « Laudate Deum » parle du dérèglement climatique, expression plus dramatique sans doute, mais beaucoup plus vraie. C’est celle que j’emploierai désormais.

Soit dit en passant, je ne suis plus catholique depuis fort longtemps. Je ne suis donc pas plus catholique que le pape. Mais je partage son combat en faveur de l’écologie.

« Richelieu », c’est du solide ! ****

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Ariane Castellanos et Marc-André Grondin dans le film de Pier-Philippe Chevigny.

Commençons par un cliché : « Richelieu » est un film coup de poing. Du genre qui vous laisse sonné. Quand le générique a commencé à défiler, j’étais au bord des larmes, le cœur gros, incapable de me relever tout de suite. Le film de Pier-Philippe Chevigny est en effet une œuvre forte, bien meilleure que ce à quoi je m’attendais. Après avoir vu la bande-annonce, je craignais un film un peu manichéen, où un méchant patron exploite sans vergogne de pauvres travailleurs guatémaltèques.

Il n’en est rien. Ce n’est pas un gestionnaire impitoyable que « Richelieu » dénonce. C’est un système où le profit repose sur l’exploitation de la main-d’œuvre. « On a un mode de vie qui est rendu possible grâce à cette forme d’exploitation », a expliqué le réalisateur en entrevue, ajoutant : « Notre panier d’épicerie ne coûte pas cher. Si on arrive à faire notre épicerie à ce prix-là, c’est probablement parce que des travailleurs souffrent en bas de la chaîne de production. » En ce sens, nous sommes tous, il faut bien l’admettre, un peu coupables des conditions déplorables imposées aux travailleurs.

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Les chambres rouges ***1/2

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Belle surprise que ce thriller à la fois judiciaire et psychologique, qui raconte le procès d’un homme accusé du meurtre particulièrement brutal de trois adolescentes. Le procès est suivi religieusement par deux jeunes femmes : Clémentine, une complotiste convaincue que les accusations sont un coup monté, et Kelly-Anne, dont les motivations paraissent longtemps ambiguës.

Soit dit en passant, on ne voit jamais les crimes. Mais pendant de longues minutes, on entend la bande-son d’une vidéo d’un de ces meurtres sordides. Les âmes sensibles devront s’abstenir ou se boucher les oreilles.  Ce n’est pas parce qu’on ne voit pas l’horreur qu’elle n’est pas palpable.

J’ai cependant moins aimé la dernière demi-heure du film, où la longue plongée dans le dark web m’a laissé plutôt perplexe, sans doute parce que je ne suis pas assez familier avec les bas-fonds clandestins de la Toile.

Un nom à retenir, Juliette Gariépy, formidable dans le rôle énigmatique de Kelly-Anne, le mannequin adepte du poker en ligne. On la reverra sans doute. Le contraire serait bien dommage.

Demain : Une femme respectable ***1/2

Une semaine à L’Île-des-Sœurs

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N.B. Ce carnet devait être publié le lundi 7 novembre, mais une erreur s’est produite. Le voici avec quelques jours de retard. Il a déjà paru sur Facebook.

La semaine dernière était seulement notre deuxième à L’Île-des-Sœurs. Mais elle fournit déjà un bon exemple de ce que sera la vie quotidienne dans ce nouveau lieu. Lundi d’abord, j’ai sauté dans le 168 pour me rendre à mon groupe de conversation en italien, au centre-ville. Trente minutes de bus plus une vingtaine de minutes à pied. Pas mal du tout.

J’en ai profité pour aller au cinéma ensuite. L’idée, c’est de regrouper les activités dans la grande ville. Je suis allé voir « Coupez ! », une comédie géniale ou insupportable, c’est selon. Rebelote mercredi, mais cette fois pour mon groupe de conversation en anglais. Je suis encore allé au cinoche, cette fois pour « Les banshees d’Inisherin », un film irlandais original et inclassable, qui ne fera pas l’unanimité non plus.

J’ai ajouté quelques courses à ma sortie montréalaise, car j’ai beau adorer ma nouvelle île, on n’y trouve pas tout, tant s’en faut. C’est d’ailleurs une dimension à laquelle il faudra s’habituer. Fini le temps où il suffisait de descendre au rez-de-chaussée pour acheter son pain chez Ange ou de traverser la cour pour aller à l’épicerie Avril.

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Quasiment le printemps !

Quand je suis sorti jeudi matin, il faisait une dizaine de beaux degrés. Les nuages s’étaient dissipés, laissant toute la place à un soleil radieux. Les moineaux de la place Riopelle piaillaient de joie dans les buissons. La neige sale fondait, laissant présager la fin du pénible hiver montréalais. Le printemps arrivait avec quatre jours d’avance. J’étais d’humeur joyeuse. J’en oubliais les malheurs de mes proches et l’invasion de l’Ukraine.

J’ai poursuivi ma promenade à travers le Vieux-Montréal où se mêlaient gens du quartier et touristes. J’avais mis la 41e symphonie de Mozart, celle qu’on appelle Jupiter, en raison de son ampleur et de sa puissance. Le compositeur Richard Strauss la considère comme l’œuvre la plus belle qu’il ait écoutée. Quant à moi, je ne connais pas meilleure œuvre pour recharger mes accus et me sentir bien vivant. Le premier mouvement est grandiose. La finale est triomphante et éblouissante.

Au retour, je me suis arrêté au IGA du Complexe Desjardins. Il faisait si beau qu’en sortant j’ai décidé de retourner à l’appartement par l’extérieur. Depuis le début de l’hiver, j’avais pris l’habitude de revenir par les tunnels qui relient Desjardins, Guy-Favreau et le Palais des Congrès. C’était à la fois pour éviter le froid, la glace sur les trottoirs et l’intersection René-Lévesque et Jean-Mance, que je redoute. Non sans raison. Encore une fois, une conductrice pressée a bien failli ne pas respecter la priorité des piétons. Voyant que son auto s’avançait dangereusement sur nous, j’ai crié « merde » en lui montrant sèchement que le feu restait rouge pour elle. Je m’étais juré de ne plus me comporter ainsi. Ce n’est bon ni pour mon cœur ni pour ma zénitude. Mais parfois, c’est plus fort que moi.

Cependant, il faisait trop beau pour rester choqué. J’ai remis le 4e mouvement et je suis rentré d’un cœur léger.

L’intello qui aimait les sports

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Mon premier gant de baseball.

J’avais beau être un enfant introverti, grand amateur de lecture, j’ai toujours aimé les sports. Mais sans y briller nécessairement.

Prenez le hockey, notre sport dit national. J’ai reçu ma première paire de patins, vers quatre ou cinq ans. C’était des patins à deux lames. Ils m’ont permis de faire mes premiers pas sur la glace de Freddy, un voisin. J’aurais dû les garder, car je n’ai jamais vraiment appris à patiner autrement que sur la bottine. J’ai eu beau m’exercer autant comme autant sur la patinoire des Rheault, je n’ai jamais su glisser avec grâce sur une surface glacée. D’où mon admiration peut-être pour les belles gracieuses du patinage artistique.

Difficile donc de briller au hockey. Je me rappelle le dernier match auquel j’ai participé. L’entraîneur m’a envoyé sur la glace. J’ai couru après la rondelle pendant une minute ou deux sans jamais y toucher. Sans me rendre compte non plus que l’entraîneur, tout énervé, me rappelait sèchement au banc. J’y suis finalement revenu et je n’en suis plus ressorti. L’entraîneur avait cependant remarqué que j’avais un beau hockey neuf. Il l’a prêté à l’un de ses bons joueurs, qui venait de casser le sien. J’ai assisté à la fin du match assis sur le banc froid, sans bâton mais avec un sentiment de nullité totale. Ce fut la fin de ma courte carrière. Je devais avoir 12 ans.

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Loin de l’université

La première année finie, j’ai quitté l’appartement en saluant plutôt sèchement la propriétaire. Je crois qu’elle était soulagée de me voir partir. Le plaisir était réciproque. Mon coloc Raymond m’a raconté qu’un soir où j’étais passablement bourré, je lui avais crié de remonter quand elle était descendue dans notre sous-sol. Mais je n’en gardais aucun souvenir.

Dans mon esprit, il était clair que je ne reviendrais pas là. Pas plus d’ailleurs que dans Sillery ou Sainte-Foy. J’avais plutôt l’intention d’habiter le Vieux-Québec ou Saint-Baptiste, ces deux quartiers fussent-ils éloignés du campus. Au moins, il y avait de la vie. Je n’en avais pas parlé à Raymond. Je n’étais pas sûr qu’il avait adoré notre cohabitation. Mais on n’en avait pas discuté non plus. Plus tard cet été-là, j’ai appris par quelqu’un d’autre qu’il allait louer un appartement avec Louis, un confrère de la faculté. Sur le coup, j’en ai été blessé.

Toutefois, cela n’avait pas une grande importance, ne serait-ce que parce qu’il avait l’intention de rester près de l’université. De plus, ma petite amie a proposé de venir me rejoindre à Québec. Nous avons opté pour le quartier Saint-Jean-Baptiste, près près de la vieille ville et de ses remparts.

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