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Archives de décembre, 2022

Mes meilleures séries de 2022

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1) M’entends-tu ? ****1/2

Voilà va série coup de cœur de l’année. « M’entends-tu ? » se déroule dans un quartier plus ou moins défavorisé. Ce qu’on nous montre, ce sont des rues pleines de nids-de-poule, des trottoirs encombrés de poubelles ou de sacs percés, des maisons défraîchies. Ici, on ne bouffe que de la malbouffe, dans des casse-croûte de deuxième ordre. Et les trois jeunes femmes dont on raconte l’amitié, Ada, Fabiola et Caro, portent presque toujours les mêmes fringues, parce qu’elles n’en ont pas d’autres. Mais la série n’est pas pour autant misérabiliste. Sans doute parce que sa conceptrice, Florence Longpré, qui tient aussi le premier rôle, a abordé la narration sous l’angle de l’humour. On rit beaucoup donc, mais c’est souvent pour ne pas pleurer, en particulier dans la deuxième saison où l’on aborde de front la violence conjugale. Et puis, dans toutes ces histoires souvent dures, on trouve de la résilience, de l’amitié et de l’espoir. (TOU.TV)

oeil2) Dans l’œil du cyclone ****

J’avais un peu hésité à entrer dans « L’œil du cyclone ». Ce n’est pas que je n’aime pas Christine Beaulieu, notre Miss Hydro-Québec, qui en est la comédienne principale. Mais l’histoire d’Isabelle, qui vit quotidiennement au cœur de la tempête, avec ses jumeaux Emma et Jules, et sa fille aînée Jade, ne m’attirait pas particulièrement. D’autant que chaque épisode ne raconte pas une ou deux histoires. C’est plutôt un enchaînement de petits sketches qui n’ont pas nécessairement de liens entre eux. D’habitude, c’est une formule qui me lasse vite. Mais fort heureusement, je ne suis pas passé à côté de cette hilarante comédie, une des meilleures séries jamais produites par la télé québécoise. (TOU.TV)

3) Je voudrais qu’on m’efface ****

J’ai été emporté par ce feuilleton québécois tiré d’un roman d’Anaïs Barbeau-Lavalette. En passant du livre à l’écran, l’action a changé de quartier, mais le milieu décrit reste pauvre, même s’il est davantage multiculturel. En s’installant dans Saint-Michel, en effet, l’action a fait apparaître notamment des personnages d’origine haïtienne. C’est une belle œuvre, très vibrante, très touchante. Le dernier épisode de la première année est un grand moment de télévision. C’est le temps de sortir vos mouchoirs. (TOU.TV)

4) Les mecs ****

Une autre bonne série québécoise, très drôle celle-là. Quand on pleure ici, c’est de rire. À conseiller après la série précédente. On trouve dans « Les mecs » un quatuor de cinquantenaires un peu dépassés et plutôt machos. Mais ce n’est pas pour autant un éloge du machisme. Au contraire, quand ils exagèrent trop, ces mâles désabusés sont remis à leur place par la barmaid, le fils du prof ou les ex. Le charme de la série tient beaucoup à la vivacité des dialogues ainsi qu’à la qualité des acteurs, qui parviennent à rendre ces losers sympathiques malgré tout, ce qui n’était pas gagné d’avance. (TOU.TV)

ethos5) Ethos ****

Une belle découverte que cette série qui montre les deux visages de la Turquie : la Turquie traditionnelle et religieuse, qui vote pour Erdogan, et la Turquie moderne et occidentalisée. Meryem, le personnage principal, passe d’un monde à l’autre, partant de sa campagne pour aller faire du ménage chez un riche d’Istanbul ou pour voir sa psychologue. Formidable ! (Netflix)

6) District 31 ****

J’ai adoré cette série policière au rythme d’enfer, et pourtant je ne suis pas déçu qu’elle ait pris fin. Il est sage que Dionne se soit arrêté après six saisons passionnantes et réussies. Il a, chose trop rare, résisté à la tentation de se lancer dans la saison de trop. J’ai la plus grande admiration pour cet auteur qui a écrit seul 120 épisodes par année pendant six ans. C’est très impressionnant ! J’ai déjà dit que « District 31 » était une drogue. Elle me manque par moment, mais j’en conserve un excellent souvenir. (TOU.TV)

7) Incroyable (Unbelievable) ****

On reste dans les polars. Mais celui-là est américain, s’inspire (très librement) d’une histoire vraie et ne dure que de huit épisodes. Toni Collette et Merritt Wever sont remarquables dans le rôle des deux inspectrices lancées à la recherche d’un violeur en série. Haletant et passionnant ! (Netflix)

la_vie_saison_2_web8) Toute la vie ****

L’action se passe à l’école Marie-Labrecque, un établissement unique au monde qui accueille des adolescentes, toutes enceintes ou jeunes mamans. Sa directrice et son psychoéducateur doivent les aider à s’instruire, tout en les préparant à assumer leur rôle de mère. Je ne sais pas s’il est vrai qu’Hélène Bourgeois-Leclerc et Roy Dupuis ont été en rivalité pendant les trois années du tournage, mais cela ne paraît pas à l’écran, où ils sont tous les deux excellents. Il ne faudrait pas oublier pour autant les jeunes filles, toutes remarquables dans des rôles difficiles. Une très belle série ! (TOU.TV)

9) Trop. ****

Au risque de me répéter, j’adore les émissions où l’on rit et où l’on pleure. « Trop. » en est une, et des meilleures. L’existence d’Isabelle est bousculée lorsque sa jeune sœur Anaïs vient la rejoindre à Montréal. C’est que la cadette est bipolaire. Mais pendant trois saisons, la scénariste Marie-Andrée Labbé réussit brillamment à éviter les clichés et la lourdeur. C’est touchant et drôle à la fois. Évelyne Brochu et Virginie Fortin sont toutes deux excellentes. (TOU.TV)

comme10) C’est comme ça que je t’aime **** ET Avant le crash ****

Pour la dixième et dernière place de mon petit palmarès, j’ai hésité entre « C’est comme ça que je t’aime », une comédie déjantée dont la deuxième saison m’a encore une fois bien rigoler, et « Avant le crash », une série forte et dure sur le milieu de la finance. Je n’arrivais pas à me décider. Alors, pourquoi pas les deux ! (TOU.TV)

Mes meilleurs films de 2022

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1) En corps ****1/2

« En corps », c’est l’histoire d’une danseuse qui se blesse gravement, au point où sa carrière est compromise. C’est une histoire de courage, de résilience, d’espoir. C’est aussi un film sur la beauté qui naît de l’art et qui nous nourrit. Marion Barbeau, qui faisait ses premiers pas au cinéma, est lumineuse dans ce rôle exigeant où elle doit passer de la danse classique à la danse contemporaine. Le charme de ce film, dont on sort heureux et ébloui, lui doit beaucoup.

2) Chronique d’une liaison passagère ****1/2

De temps à autre, et c’est assez rare, un film vous emporte, vous séduit, vous bouleverse. C’est le cas de cette « Chronique d’une liaison passagère ». J’ai adoré (et le mot n’est pas trop fort) le nouveau Mouret. J’irais même jusqu’à dire que c’est son meilleur film. Le raconter ne donnerait rien ; il faut le voir… et l’entendre.

3) Drive My Car ****

Cette œuvre de trois heures sur le deuil est exigeante. Mais les tourments des personnages s’apaisent dans une finale magnifique et cathartique, où résonnent les dernières répliques d’« Oncle Vania ». « Que faire ? Il faut vivre ! Nous vivrons, oncle Vania ! Nous supporterons patiemment les épreuves que nous enverra le destin. »

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Les réalisatrices Catherine Chabot et Miryam Bouchard.

4) Lignes de fuite ****

De « Lignes de fuite », on sort plutôt abasourdi, sonné. Ce film tiré d’une pièce de Catherine Chabot commence pourtant sous des dehors de comédie. On rigole beaucoup jusqu’à ce que la rencontre entre trois copines du secondaire et leurs conjoint(e)s, qui devait être une fête, tourne carrément au vinaigre. Là, si on rit encore, c’est qu’on rit jaune. Le vernis de l’amitié craque vite quand ces trois couples dépareillés sont confrontés à leur vision de l’avenir. Cette œuvre québécoise m’a fait penser à « Parasite », ce film coréen oscarisé, où tout dégénérait sur fond de tempête. Brillant et saisissant !

5) Presque ****

On ressort de ce petit film plus serein, plus heureux. C’est ce que les Américains appellent « a feel-good movie ». L’intrigue est construite autour d’Alexandre Jollien, qui joue dans « Presque » un personnage qui lui ressemble beaucoup dans la vie. Ce philosophe est né infirme moteur cérébral. Dans « Presque », il joue le rôle d’un livreur de produits bio qui poursuit sa quête de sagesse en s’inspirant des philosophes. Cette recherche le mène de Lausanne à Montpellier à bord d’un corbillard, en compagnie d’un croquemort et de deux morts. Ne vous inquiétez pas, ce n’est ni glauque ni morbide. Au contraire, on rit beaucoup, on a parfois les larmes aux yeux et on en ressort léger, léger, prêt à s’envoler.

6) Coupez ! ****

Comme l’écrit le journaliste Normand Provencher, les comédies sont rares au cinéma et « Coupez ! » en est une bonne. J’irais même jusqu’à dire une excellente. Il n’y a pas un film qui m’ait autant fait rigoler cette année. Le nouvel opus de Michel Hazanavicius raconte le tournage d’un court-métrage de zombies, qui doit être fait pour des producteurs japonais en un seul plan séquence. Évidemment, tout cela va vite dégénérer. Le sang gicle, les têtes s’envolent, c’est fou, fou, fou. On aime ou pas. Moi, j’ai ADORÉ.

dont'7) Don’t Look Up : déni cosmique ****

« S’il est puissamment drôle, Don’t Look Up laisse aussi amer », écrit L’Humanité. Et LCI enchaîne : « Une satire mordante qui fait autant sourire qu’elle inquiète. » Vous voilà prévenus : l’humour de ce « Déni cosmique » est noir, très noir. Et pour cause. Deux astrophysiciens découvrent qu’une imposante comète file droit vers la Terre, qu’elle risque d’anéantir. Terrifiés, ils s’empressent de diffuser la nouvelle. Mais la présidente des États-Unis a mieux à faire que de les écouter. Ils sont invités dans un talk-show, mais une chanteuse populaire leur vole la vedette avec ses problèmes de cœur. Et la population, elle, eh bien, elle s’en fout un peu.

8) Notre-Dame brûle ****

Dans ce spectaculaire opus, Jean-Jacques Annaud rend un bel hommage à l’héroïsme des pompiers de Paris, qui ont sauvé la cathédrale mythique d’une destruction annoncée. J’avais suivi l’incendie à la télé française, le cœur serré et les larmes aux yeux. J’étais à Paris. Je me demandais si le réalisateur de « La guerre du feu » était parvenu à rendre cette émotion qui s’était propagée, en quelques heures, presque à la terre entière. Eh bien oui ! En mêlant brillamment films d’archive et reconstitutions, Annaud réussit à faire revivre la conflagration.

alz9) Tu te souviendras de moi ****

Édouard est un professeur d’histoire émérite qui pourrait vous raconter toutes les guerres, mais qui ne pourrait vous dire ce qu’il a mangé le matin même. C’est qu’il souffre de la maladie d’Alzheimer. Les scénaristes Éric Tessier et François Archambault abordent ce sujet difficile avec finesse, tendresse et humour. La relation inattendue qui se crée entre le vieux professeur et la fille de son beau-fils fonctionne à merveille. Grâce, bien sûr, à Rémy Girard, brillant comme d’habitude, mais grâce aussi à Karelle Tremblay, qui rend crédible ce rôle difficile.

10) Tout s’est bien passé ****

Emmanuèle se précipite à l’hôpital, où son père André vient de faire un AVC. Il a beaucoup aimé la vie, mais il n’a pas envie de la poursuivre aussi diminué. Il demande à sa fille de l’aider à en finir. Le suicide assisté n’étant pas possible en France, il faudra se rendre en Suisse. François Ozon, bien aidé par André Dussolier et Sophie Marceau, a tiré du roman autobiographique de Emmanuèle Bernheim un récit profondément émouvant.

Un nouveau regard sur l’hiver

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Je ne pourrai plus jamais dire que je déteste l’hiver. En tout cas, pas quand la saison froide crée un décor aussi féérique que samedi. D’ailleurs, l’adjectif « froide » convenait assez peu pour la décrire ce jour-là. Bien sûr, à -1 C on est loin des 30 degrés qu’un ami frileux a récemment connus au Mexique. Mais vêtu convenablement, -1 C c’est tout à fait confortable. D’autant qu’il ne ventait pas. Et puis, -1 C cela permet à une neige lourde de se percher délicatement sur les arbres, où elles forment des sculptures, éphémères sans doute mais magnifiques. Cela permet aussi de donner vie à de beaux bonhommes de neige. Nous en avons découvert quelques-uns sur le sentier que nous avions emprunté, ma compagne et moi.

J’ai dit à Lise : « T’en rends-tu compte ? Pour parcourir des paysages aussi beaux, on n’a même pas besoin d’avoir un chalet. » Pas même besoin d’automobile. Pas de route à faire. On prend l’ascenseur, on sort de l’immeuble, et voilà, nous sommes sur le sentier. Le bonheur, quoi !

Il y avait d’ailleurs du bonheur dans l’air. Les gens rencontrés n’avaient pas un bonnet enfoncé sur la tête, le col monté jusqu’aux oreilles et la mine renfrognée des jours sombres et froids. Au contraire, tout le monde arborait un grand sourire. Les gens se parlaient volontiers. « Quelle belle journée ! » était sur toutes les lèvres.

Nous avons vu, furtivement certes, mais de nos yeux vu un cardinal. Mon amoureuse a d’abord cru qu’il s’agissait d’un merle. Mais non, c’était bien un cardinal. Quel bel oiseau ! Juste de l’entrevoir à l’occasion illumine mes journées. Les bernaches se laissaient glisser sur les eaux douces de la Pointe-Sud. Un peu plus loin, c’étaient les canards.

Nous avons croisé une skieuse, mais pas de raquetteurs. Nous avons seulement vu des traces de raquettes, qui nous ouvraient la voie dans le domaine Saint-Paul. Nous n’avions pas mis les nôtres ; nous attendrons qu’il y ait plus de neige. Mais c’est une possibilité de plus qui s’offre à nous, encore une fois à deux pas de notre appartement.

Notre premier hiver à L’Île-des-Sœurs commence décidément sous de bons augures.

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Slush, sloche, gadoue, névasse ?

Pendant que nous parcourions nos beaux sentiers, les Montréalais du continent, comme j’aime à les appeler, pataugeaient sans doute dans ce « mélange de neige fondante, de sable, de sel ou de calcium » si caractéristique du Québec hivernal et citadin. Avec les changements climatiques, on risque d’y mettre les pieds encore plus souvent, notamment dans le sud de la province.

On a d’abord emprunté à l’anglais le mot slush pour décrire ce phénomène. L’orthographe du mot s’inté­grant mal au français, on a cherché des solutions de rempla­cement. C’est ainsi qu’on a vu apparaître la forme francisée sloche, que j’aime bien et que j’emploie à l’occasion. Puis, on s’est rabattu sur gadoue, terme qui a le sens de « terre détrem­pée » en France, mais qui, comme le fait remarquer l’OQLF, est aisément appli­ca­ble à l’état de nos rues et de nos trottoirs en hiver. Gadoue me paraît préférable à bouillie neigeuse, locution qui ne s’est pas imposée, ainsi qu’à neige fondante ou neige fondue, solutions trop jolies et trop propres. Autre solution possible : névasse, mot formé d’après névé (masse de neige durcie) et -asse. On trouve ce terme dans Le grand Robert. Je ne sais pas si c’est encore le cas, mais il était populaire à Radio-Canada à un certain moment.

Et vous, quel mot employez-vous ?

Le dernier Mouret, du grand Mouret !

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De temps à autre, et c’est assez rare, un film vous emporte, vous séduit, vous bouleverse. C’est le cas de cette « Chronique d’une liaison passagère ». J’ai adoré (et le mot n’est pas trop fort) le nouveau Mouret. J’irais même jusqu’à dire que c’est son meilleur film.

Pourtant, j’ai déjà cru que le réalisateur de « L’art d’aimer » était condamné à refaire le même opus toute sa vie. Mais j’avais oublié que les jeux de l’amour et du hasard sont infinis. Il m’avait échappé aussi qu’en vieillissant, Mouret allait continuer à mûrir. Ses œuvres sont toujours légères, subtiles, charmantes, amusantes et enjouées, mais avec des notes de gravité qui doivent beaucoup, je crois, à la maturité.

Pas surprenant que l’auteur ait choisi les sonates pour piano de Mozart pour accompagner son histoire. Pas une musique ne pouvait coller mieux à cette chronique à la fois moderne et au charme un peu suranné. Mouret dit : « Ce qui est beau dans cette légèreté mozartienne, c’est qu’elle est profonde. » On pourrait dire la même chose de son cinéma.

(suite…)