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Archives de la catégorie ‘Culture et sport’

Karl, la voix d’une nation ?

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Il y a quelques jours, quand j’ai appris la mort de Karl Tremblay, j’ai bien senti que quelque chose de grave se passait. « Comme des centaines de milliers de Québécois de tous les âges, de toutes les conditions, a écrit Marie-France Bazzo avec un peu d’enflure, de battre mon cœur s’est arrêté. Les larmes coulaient, inépuisables, sorties de nulle part. »

Je dois avouer que je n’en ai versé aucune. De toute ma vie (78 ans tout de même au compteur), je n’avais entendu au complet qu’une chanson des Cowboys Fringants. Il s’agissait de Toune d’automne, qui m’avait paru un brin xénophobe et que je n’avais pas particulièrement aimée.

Devant l’ampleur de l’événement, j’ai cependant essayé de me rattraper. J’ai ouvert Spotify pour découvrir les chansons les plus connues du groupe. Je ne vais pas me mettre à écouter en boucle tous les disques des Cowboys de Repentigny. Mais j’ai quand même ajouté huit titres à ma liste d’écoute de chansons québécoises. Ma sélection comprend, bien sûr, Sur mon épaule et L’Amérique pleure. Ma préférée : Les étoiles filantes. J’en ai même regardé cinq enregistrements, qui vont du Gala de l’Adisq en 2008 (avec Robert Charlebois au piano) au spectacle sur les Plaines l’été dernier (1).

La poésie de Jean-François Pauzé est simple, mais touchante. Quant à la mélodie, sans fioritures elle aussi, elle est harmonieuse. Je saisis mieux maintenant l’enthousiasme suscité par le groupe depuis 27 ans et la douleur provoquée par la perte de son soliste. On ne peut qu’être bouleversé de voir le cancer faucher dans la force de l’âge un homme aussi attachant.

Cela dit, il me paraît exagéré d’entendre que Karl Tremblay était la voix de la nation. Car ce n’est pas la nation québécoise diversifiée, haute en couleur, multiethnique et plurilingue que chantent les Cowboys. C’est plutôt celle issue de la colonisation blanche et française. Je ne le dis pas pour choquer ; je constate tout simplement. Le « nous » des Cowboys ne me semble pas très inclusif.

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Le tennisman qui marchait sur l’eau

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Cette photo J-M. Pochat, publiée dans L’Équipe, est pour moi l’illustration parfaite de l’apparente facilité du jeu de Federer.

Roger Federer jouera le prochain week-end son dernier tournoi professionnel. J’en éprouve évidemment une certaine nostalgie, mais je n’en suis pas triste, car je n’aurais pas aimé voir mon préféré jouer diminué. Et puis, qu’aurais-je pu lui demander de plus ? En 65 ans de passion pour le tennis, aucun joueur ne m’a donné d’aussi grandes joies ni d’émotions plus intenses. Pour moi, Rodgeur, c’était Stefan Edberg et Pat Rafter, mes précédentes idoles, à la puissance 10.

Le Suisse m’a fait écarquiller les yeux pour la première fois en 2001, quand il a éliminé Pete Sampras, septuple champion à Wimbledon. Pendant les deux années suivantes, sa carrière a un peu galéré. Tous vantaient son immense talent, mais on le disait fragile et inconstant. C’est juste que tous les éléments n’étaient pas encore en place. En 2003, il triomphe avec panache au All England Club pour la première fois. Sept autres victoires allaient suivre dans le Grand Chelem anglais.

Federer, il est vrai, n’a pas confirmé tout de suite son arrivée au sommet. Quelques mois plus tard, à l’US Open, il était encore une fois battu par David Nalbandian, une de ses bêtes noires, qui exploitait la faiblesse (toute relative) de son revers sur les balles hautes, comme le fera si bien Rafael Nadal quelques années plus tard. Mais cette année-là, le Suisse a remporté le championnat de fin de saison et c’était parti pour quatre années de domination presque totale. C’est ce que j’appelle sa chevauchée fantastique.

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En croisant Pierre Lapointe

mauve3Il y a quelques jours, pour faire mes courses, j’avais choisi Pierre Lapointe pour m’accompagner. Or devinez qui je croise, rue McGill ? Eh oui, Lapointe lui-même. Un moment, j’ai pensé à l’arrêter pour lui dire, avec enthousiasme, que j’étais en train d’écouter « L’heure mauve », qu’il a créé pour la très belle exposition de Nicolas Party, au Musée des Beaux-Arts. Mais je n’ai pas l’habitude de jouer les groupies. Aussi ai-je eu peur de l’importuner. D’autant qu’il marchait vite, le nez dans son cellulaire.

Très beau disque que « L’heure mauve » ! On y trouve quelques compositions de l’auteur. Ma favorite est « Aujourd’hui la neige revient », que j’écoute en boucle sans jamais me lasser. Mais Lapointe est aussi un excellent chanteur, capable d’interpréter avec bonheur tant Charles Aznavour que Claude Léveillée ou même Félix Leclerc. Cela dit, sa voix convient mieux aux deux premiers.

À noter : une interprétation très personnelle et très belle de la célébrissime « Gnossienne no1 » d’Éric Satie.

Nadal et moi

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Je dois avouer, même si je n’en suis pas fier, que j’ai longtemps détesté Rafael Nadal, qui vient de remporter Roland-Garros pour la quatorzième fois. Pourquoi ? Sans doute parce qu’il battait trop souvent mon favori, Roger Federer, que j’idolâtrais.

Je trouvais tous les défauts à Rafa. Je jugeais son jeu trop défensif, donc ennuyeux. Ses nombreux tics et ses non moins nombreux tocs m’agaçaient. Je le soupçonnais de doper sa musculature aux stéroïdes. Même sa célèbre modestie me paraissait fausse. Bref, pendant les sept ans où j’ai couvert le tennis pour le site web de La Presse, je me suis montré peu gentil à l’égard de ce grand champion.

Puis peu à peu, mon regard a changé. J’ai vu son jeu évoluer. Nadal a amélioré son service et sa volée. Je suis devenu admiratif de sa légendaire combativité ainsi que de sa vive intelligence du jeu. Alors que ses rivaux français Richard Gasquet et Gaël Monfils, issus de la même génération, trouvaient toujours une nouvelle façon de perdre, le Majorquin inventait sans cesse une nouvelle façon de gagner. Dans ce dernier Roland-Garros où il est arrivé sans être au sommet de sa forme et où il a été souvent bousculé, il a démontré qu’aucun joueur de tennis ne savait gérer mieux que lui les points importants.

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Tyrannique mais génial

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« Faut-il séparer la vie de l’artiste de son œuvre ? » nous demande-t-on dès le début de l’exposition consacrée à Picasso au Musée des beaux-arts de Québec, où l’on nous rappelle les comportements répréhensibles du maître à l’égard des femmes. Cette drôle de question risquait de biaiser la visite, mais elle avait sans doute pour but de dédouaner le Musée, tant le peintre le plus célèbre du XXe siècle est devenu toxique dans la foulée du mouvement MeToo.

Dora Maar, une des compagnes du créateur, lui a dit un jour : « En tant qu’artiste, tu es peut-être extraordinaire, mais moralement, tu ne vaux rien. » Un jugement lapidaire renforcé par celui d’une autre conjointe, Françoise Gilot, qui dans « Vivre avec Picasso » trace, l’image d’un homme envahissant, dominateur, cruel, geignard, agressif, irascible et désagréable.

Je n’ai aucune raison de douter de ces témoignages. Il me paraît tout à fait vraisemblable que Picasso, moralement, ne valait rien. Mais cela ne change rien à l’opinion que j’ai de lui en tant que créateur.

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Heureux d’un printemps…

« Heureux d’un printemps qui me chauffe la couenne… » J’ai réécouté la chanson de Paul Piché cette semaine. Elle a bien vieilli, je trouve. Ses premières paroles expriment bien, en tout cas, ce que j’ai ressenti pendant mes promenades quotidiennes depuis que le mercure a allégrement grimpé. Qu’il est agréable de marcher quand on n’a pas l’impression d’être agressé par le froid ! Quand on tient ses bâtons de marche à main nue plutôt qu’avec de grosses mitaines ! Quand on n’a pas besoin d’une tuque enfoncée jusqu’aux yeux ! Quand on peut troquer son gros manteau d’hiver contre un coupe-vent léger et ses grosses bottes contre des chaussures de course !

Ma compagne croit qu’il faut avoir vécu l’hiver pour goûter à ce point le printemps. Moi je trouve que c’est cher payer. Reste qu’on est en train de sortir de la saison infernale. Je ne peux que m’en réjouir.

D’autant que, sur le front de la pandémie, les nouvelles ne sont pas trop mauvaises. Certes, Montréal reste en zone rouge, comme le rappellent chaque jour les grands bureaux avoisinants, désespérément vides. Nous sommes toujours sous le coup d’un couvre-feu et d’un confinement. Incapable de vraiment mettre en place la stratégie tester-tracer-isoler, notre gouvernement populiste continue à appliquer ces mesures moyenâgeuses.

Mais au moins, le nombre de cas a chuté, tout comme les hospitalisations et les morts. La vaccination, après avoir traîné les pieds, va bon train. Au Palais des congrès, juste à côté de chez nous, l’opération est d’une remarquable efficacité. Je fais partie de ceux qui peuvent maintenant lancer : « Je suis vieux et vacciné. » D’ici notre fête nationale, nous promet le premier ministre, tous les adultes devraient avoir reçu la première dose du vaccin. J’applaudis.

De plus, on peut enfin retourner au cinéma et dans les musées. Je suis déjà allé au cinoche trois fois et dans les musées deux fois. Quelle joie ! Et les salles de spectacle et de concert sont sur le point de rouvrir. J’ai déjà acheté nos billets pour un concert à la salle Bourgie. Que du bonheur pour nous ! Et pour les artistes sans doute, déprimés, voire suicidaires, après une année de Covid-19, où ils n’ont pas pu se produire, même pendant les périodes où les centres commerciaux étaient ouverts.

J’ai bien hâte de voir les proches autrement qu’en visioconférence. J’ai lu récemment un article montrant à quel point les rencontres sur Zoom ou sur Messenger ne sont pas naturelles. Mais j’ai tenu bon, car je préfère voir mes amis sur un petit écran que de ne pas les voir du tout. Reste que rien ne remplace leur chaleureuse proximité.

Je suis impatient également de voir rouvrir les restaurants et les cafés, sans lesquels la vie en société manque tellement de charme et de raffinement. Chaque fois que nous sommes allés au cinéma, Lise et moi, nous avons été un peu frustrés de ne pouvoir aller dans un café après la projection pour parler du film. Aller au Musée des beaux-arts, sans s’arrêter d’abord à son restaurant, c’est pour nous une expérience incomplète. Même chose pour le musée de Pointe-à-Callières, où L’arrivage, avec ses bons plats, ses bons vins et sa belle vue, nous manque.

J’espère que, contrairement à la chanson, on ne vivra pas « rien qu’au printemps ». L’été aussi, souhaitons-le, sera magnifique.

Pourquoi un nouveau stade ?

Photo pinterest.fr

J’ai déjà beaucoup aimé le baseball. Au point d’écouter parfois des matchs à la radio pendant la grande période des Expos. Mais quand ces derniers ont quitté la ville, j’ai accroché ma casquette et cessé de suivre ce sport.

Serais-je heureux du retour du baseball à Montréal? Sans doute. Mais pas aux frais des contribuables. Pas pour contribuer à faire vivre des millionnaires qui touchent des salaires indécents.

D’autant que la ville a déjà un grand stade, que boudent les promoteurs depuis les années 80. Je ne sais trop pourquoi. On lui reproche d’être dans l’est de la ville. Je veux bien croire que c’est loin des restos chics du centre, mais Hochelaga-Maisonneuve, ce n’est quand même pas le bout du monde. Soit dit en passant, le métro s’y rend. Eh oui! C’est peut-être difficile à croire pour des promoteurs qui préfèrent rouler en Mercedes ou en Land Rover. Mais le Parc olympique compte même deux stations.

On reproche aussi à ce stade de béton d’être lugubre. C’est vrai quand n’y viennent que quelques milliers de spectateurs. Mais j’ai assisté à des rencontres quand il était rempli à craquer et il y avait là, je peux en témoigner, une atmosphère formidable.

Bref, oui au retour du baseball, mais dans un stade déjà payé.

https://www.lapresse.ca/sports/baseball/2021-03-23/l-etat-doit-il-financer-un-nouveau-stade.php

 

Monsieur le Premier ministre,

Photo PC

Je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps (1). Je viens d’aller au cinéma. Vous me l’auriez déconseillé sans doute tant vous avez hâte qu’on s’encabane pour 28 jours. Mais j’ai voulu profiter des deux journées de grâce que vous nous avez laissées avant que ne débute le deuxième confinement, un mot dont vous avez caché le nom.

Je n’avais pas l’intention de rester chez moi pendant le prochain mois. Mais où voulez-vous que j’aille maintenant ? J’adore le cinéma ; vous venez de fermer les salles. J’aime me rendre dans les musées : fermées aussi. J’avais recommencé à fréquenter les restaurants et les cafés ; je ne pourrai plus le faire. J’étais tout content de retourner entendre des concerts cet automne ; je devrai me contenter de Spotify. Je m’apprêtais à passer un deuxième hiver au Québec en dix ans, auprès de mes proches ; vous m’interdisez de les voir, sinon un à la fois et dans des circonstances extrêmes. Si je vous écoutais, je ne pourrais même plus prendre l’ascenseur avec mes voisins, fussent-ils masqués.

En annonçant ce confinement déguisé, vous avez dit avoir le cœur gros. Moi, je suis plutôt en colère. Contre vous. Sans doute voulez-vous mon bien, comme celui de toute la population. Je m’efforce de ne pas douter de votre bonne foi. Mais les mesures que vous nous imposez se révéleront, dans la majorité des cas, aussi inutiles que néfastes.

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Les tours toujours vides

Notre nouvel appartement donne sur la Caisse de dépôt et placement, un grand immeuble qui couvre deux pâtés de maisons mais qui pour l’heure reste désespérément vide. Mercredi dernier toutefois, un homme est venu s’installer dans un bureau et y a travaillé quelques heures. On s’est dit : tiens, peut-être que quelques employés, las du télétravail, vont enfin se téléporter dans l’édifice Jacques-Parizeau. Mais c’était un mirage. Le lendemain, l’employé n’était pas de retour. Ni personne d’ailleurs.

Le surlendemain, j’ai compté deux employés. À ce rythme, le bâtiment devrait être rempli d’ici 2025. J’ai aussi juste vu passer en soirée une femme de ménage. Les bureaux sont vides mais rutilants de propreté. Comme ça, on ne pourra dire qu’on y brasse de l’argent sale.

Pourtant, je n’arrête pas de rencontrer des gens qui affirment en avoir marre du travail à distance. « J’aime bien mes colocs, m’a dit un informaticien français fraîchement arrivé de Boston, mais je commence à en avoir assez de les voir toute la journée, les soirs et les week-ends. » « On devient meilleur en travaillant avec des collègues », m’a confié un ingénieur qui s’ennuie des ateliers de production.

Il faut dire que ces nostalgiques du travail au bureau habitent Montréal. Ce qui m’amène à penser que ce qui plaît aux adeptes du télétravail, ce n’est pas tant de bosser à la maison que d’éviter les longs déplacements vers la métropole. Mais alors, pourquoi sont-ils allés crécher si loin ?

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Rues piétonnières

La rue de la Commune est enfin fermée à la circulation dans le Vieux-Montréal, mais sur un petit bout seulement.

On a présenté comme révolutionnaires les quelque 300 kilomètres de rues et d’artères commerciales réaménagés pour faire plus de place aux piétons et aux cyclistes en cet été de coronavirus à Montréal. C’est sans doute audacieux dans une ville qui a eu besoin d’une vingtaine d’années de discussions et de consultations avant de fermer un petit bout de la rue Saint-Paul, et même pas en permanence.

Je suis quant à moi plutôt frappé par la timidité du projet, du moins dans le Vieux-Montréal. La rue de la Commune est maintenant fermée la circulation, il est vrai, mais seulement de Bonsecours à Saint-Laurent ; bref, trois fois rien. Ailleurs dans le quartier, les voitures continuent à faire un tapage d’enfer dans des rues qu’on a pavées à grands frais, qui se détériorent à la vitesse grand V et où les piétons restent cantonnés à des trottoirs si petits qu’il est difficile de s’y croiser.

Même si la circulation n’y est pas fluide, la métropole demeure une ville aménagée pour les véhicules.

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Nos vies en photos

Ma compagne et moi avons profité du confinement pour numériser nos vieilles photos. Entendez par là nos clichés antérieurs à 2006, année de notre premier appareil numérique. Nous en avions presque 2000 à faire, une grosse tâche. C’est pourquoi nous nous sommes mis à deux. Lise numérisait les photos et rédigeait les légendes. Je récupérais le tout dans Google Photos, où je recadrais et retouchais les images au besoin avant de les classer. Nos vies entières tiennent maintenant dans une soixante d’albums, dont plus de la moitié relatent nos nombreux voyages.

Ce qui montait à la fin de ce travail de moine, outre la satisfaction d’être passé à travers, ce n’était pas la nostalgie. Non, plutôt un grand sentiment de gratitude, le sentiment d’avoir beaucoup vécu et d’en être rempli. Car, comme le dit bien le philosophe Épicure, il ne faut pas pleurer pour ce qui n’est plus, mais se réjouir de ce qui a été.

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Séries policières

Une scène de SUBURRA.

Est-ce à cause du confinement ? Toujours est-il que nous regardons beaucoup de séries policières en ce moment. Il faut croire que, en ces temps de pandémie, nous n’avons pas trop envie de nous prendre la tête. Après « Ozark » et « Il Processo », dont j’ai déjà parlé, nous nous sommes lancés dans « Secret City » et « Suburra ».

La première est australienne. Elle s’étend sur deux saisons de six épisodes chacune et met en vedette une journaliste politique, qui enquête, non sans mal, sur un monde politique dévoyé et sans morale. C’est assez manichéen, il faut le dire, mais on se laisse facilement porter par ces intrigues complexes, pleines de rebondissements. La série est si agréable qu’on a avalé les deux saisons en moins d’une semaine, sans indigestion.

« Suburra » nous amène aussi dans le monde politique, mais pas seulement. Nous sommes ici à Rome, où la mafia, qui est au centre du récit, tisse ses liens avec les politiciens, bien sûr, mais aussi jusqu’au Vatican. Nous sommes au royaume de la corruption.

Je craignais que cette série italienne ne soit trop brutale, et il est vrai qu’elle n’est pas destinée aux enfants de chœur. Mais je n’ai pas vu de complaisance dans la violence, même si les meurtres et les passages à tabac sont nombreux et souvent crus. C’est la loi du milieu.

Le scénario met plutôt l’accent sur les rivalités et les complicités mouvantes, qui opposent ou unissent les personnages principaux de cette œuvre chorale. Chaque soir, on avait hâte de retrouver mafieux et corrompus. C’était passionnant !

Du moins la première saison. Dans la deuxième, qui se termine en queue de poisson, les scénaristes n’ont pu résister au piège de la surenchère dans la méchanceté, la violence, l’amoralité et le cynisme. Ça reste excitant, mais le récit perd en vraisemblance.

Espérons que la troisième ressemblera plus à la première qu’à la deuxième.

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Les écouteurs de retour

Comme je pars marcher tous les matins depuis que je suis sorti de la quarantaine, il y a deux mois, j’ai repris les écouteurs. Depuis quelque temps, mon esprit se mettait à tourner comme le hamster dans sa roue. Je n’arrivais plus à le stopper. Pendant quelques jours, j’ai écouté en boucle Joan Baez. J’avais délaissé « la reine du folk » depuis des décennies. Mais après lu que plusieurs fans de Pomme trouvaient des similitudes entre la voix de la jeune Française et celle de la célèbre Américaine, j’ai eu envie d’entendre si la comparaison tenait la route. Et c’est bien le cas. Il n’y a pas des tonnes de chanteuses populaires capables de se hisser allégrement dans les aigus avant de redescendre, comme si de rien n’était, dans ces graves si difficiles à maîtriser. Ces deux sopranos à la voix céleste savent magnifiquement le faire.

La comparaison est frappante quand on compare les deux voix au même âge, c’est-à-dire au début de la vingtaine. Écoutez, par exemple, « Donna, Donna ». C’est une jolie chanson de Baez que Pomme pourrait intégrer à son répertoire.

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Une découverte : Graeme Allwright

Il y a des destinées atypiques. Ce sont souvent celles qui me plaisent le plus. Prenez Graeme Allwright. Je l’ai découvert grâce à Spotify, qui lui a trouvé des ressemblances avec Joan Baez. Il arrive que l’intelligence, même artificielle, ne soit pas stupide.

Ce Néo-Zélandais immigre d’abord à Londres pour y étudier le théâtre, en s’engageant comme mousse sur un bateau. C’est là qu’il rencontre Catherine Dasté, qu’il suit en France et qu’il épouse. Après avoir exercé de très nombreux métiers, il finit par se lancer dans la chanson. Il a 39 ans quand sort son premier disque, grâce à Mouloudji. C’est le début d’une carrière longue mais discrète, Allwright fuyant la célébrité. Dans son répertoire, les titres personnels alternent avec des traductions, notamment de Cohen et de Dylan.

Allwright chantait, disait-il, pour rendre les gens heureux. C’est ce que j’éprouve en l’écoutant : un grand bonheur.