Nice entre la mer et les Alpes maritimes. (Photos Lise Roy)
J’ai emprunté le titre de mon carnet à l’excellent ouvrage de François Cardinal et Pierre Thibault (1). Dans leurs dialogues, les auteurs établissent un lien entre la beauté d’un lieu et le bonheur de ses habitants. Pour le journaliste et l’architecte, la ville la plus magnifique à cet égard est Copenhague.
Pour ma part, je n’ai jamais visité la capitale du Danemark. Parmi les villes où j’ai séjourné, les deux plus belles sont Paris et Rome. J’y ai passé de bien beaux moments. Il est vrai que le sentiment de beauté qu’on y éprouve est une joie pour les yeux comme pour l’âme et le cœur.
Cependant, le plaisir de s’y promener est amoindri par l’automobile. Ni l’une ni l’autre n’ont été conçues pour nos chevaux-vapeur polluants et bruyants. En tant que Parisien d’occasion, j’appuie donc avec enthousiasme les efforts de la mairie pour limiter la place de l’automobile en général et pour la piétonnisation des berges de la Seine en particulier.
Il y a aussi des autos à Nice, où nous passons tout le mois de mars. Mais on les sent moins, sans doute parce que la cité est plus petite et que son centre n’aimante pas des millions de banlieusards. Sans doute aussi parce qu’elle est desservie depuis quelques années par un rutilant tramway. Le Vieux-Nice où nous vivons est quant à lui interdit aux véhicules.
La beauté de Paris et de Rome tient presque essentiellement à leur architecture, exceptionnelle il faut bien le dire. Ce ne sont pas les sept petites collines de la Ville éternelle ou la butte Montmartre de la Ville lumière qui expliquent leur charme, mais la splendeur de leurs immeubles, de leurs monuments, de leurs parcs.
Les maisons, les palais et les édifices de Nice, quoique fort beaux, sont peut-être moins remarquables. Mais le site, entre la Méditerranée et les Alpes maritimes, est, lui, absolument splendide. Où que l’on soit dans la ville, le point de vue est ravissant. C’est encore plus vrai si la balade passe par la colline du Château.
Comme elle est tout à côté du vieux quartier, c’est par là que commence la promenade du matin. La pente qui mène à la colline est un peu raide mais tonique. Le premier jour, je pompais l’huile. Mais déjà, ça va mieux. Lise est beaucoup plus en forme. N’empêche qu’elle a ressenti quelques douleurs dans les cuisses au début.
Un peu partout, on peut s’arrêter pour admirer le point de vue, là sur la vieille ville, là sur le port, là sur la baie des Anges, là sur les monts environnants. Partout, la beauté vous saute aux yeux, particulièrement les jours où le soleil est au rendez-vous. Déjà, on peut voir des fleurs. D’ici une semaine ou deux, il devrait y en avoir partout. La colline en fleurs, au printemps, c’est un spectacle grandiose.
Nous redescendons par le grand escalier qui mène à la promenade des Anglais. C’est là en effet que commence ce grand chemin pour piétons et cyclistes qui longe la Méditerranée et qui s’allonge sur cinq ou six kilomètres. D’un côté la mer, de l’autre les immeubles cossus et colorés de Nice.
Quand Lise m’accompagne (car un jour sur deux, elle abandonne son vieux mari pour aller courir sur la promenade), nous nous arrêtons au grand marché public, où l’on trouve fruits, légumes, noix, fromages, œufs et j’en passe. Qui plus est, généralement à bon prix. Au besoin, on s’arrête ensuite dans une des boulangeries ou une des boucheries du quartier.
Il y a deux jours, ma compagne a proposé qu’on s’arrête sur la plage pour aller méditer. Sitôt dit, sitôt fait. On repère deux belles roches où nous nous installons. Bien sûr, c’est un peu dur pour les fesses, mais ça garde éveillé. Le seul souci, c’est que la mer est bien proche. Mais bon, les vagues viennent se fracasser l’une après l’autre à quelques mètres de nous, nous laissant les pieds au sec. Tout au plus, sommes-nous caressés par les embruns. C’est loin d’être désagréable. Le bruit de la mer, le ballet des vagues, la sensation du vent, l’air salin : les sensations sont bonnes.
Nous sommes restés là, en pleine conscience, jusqu’à ce qu’une vague plus forte que les autres ne vienne inonder mes baskets et mouiller le sac contenant les mets que nous venions d’acheter. Ça nous a ramenés sur le plancher des vaches, si je puis dire. Nous avons éclaté de rire avant de retourner gaiement à l’appartement. Oui, la beauté peut rendre heureux.
(1) « Et si la beauté rendait heureux », de François Cardinal et Pierre Thibault, éditions La Presse, Montréal, 2017.
Le port de Nice dominé par un yacht de milliardaire.