Un vagabond idéologique
Pour qui votez-vous, a-t-on demandé au comédien Fabrice Luchini, qui a répondu à corsematin.com avec un brin de cabotinage : « Tout dépend de l‘heure. Le matin, je peux me lever extraordinairement réactionnaire. Vers 14 h, j‘ai un élan humain. Et vers 16 h, je redeviens pessimiste. Je suis un vagabond idéologique.» Vagabond idéologique, je n’avais pas encore trouvé mieux pour me définir. Comme lui, je pourrais dire : «Je ne suis pas du tout de droite, mais pas tellement de gauche, non plus.»
Voyons la droite d’abord. Bien sûr, je n’ai pas d’atomes crochus avec elle. Il y a quelques années, je me suis intéressé au mouvement Occupons Wall Street, qui dénonçait les abus du capitalisme financier et qui mettait en relief la richesse indécente de un pour cent de la population. Dans Hell, un roman de Lolita Pile, le personnage principal décrit cette situation avec une insolence désarmante : «Le monde est divisé en deux, il y a vous et puis il y a nous… Nous, nous pouvons tout faire, tout avoir, puisque nous pouvons tout acheter. Nés avec une petite cuiller en argent dans nos bouches VIP, nous enfreignons gaiement toutes les règles car la loi du plus riche est toujours la meilleure.»
Dans le même esprit, j’ai été choqué d’apprendre récemment que les avoirs de 62 personnes égalaient celles de la moitié de l’humanité. C’est-à-dire qu’une poignée d’individus possède autant que trois milliards et demi de personnes. L’ampleur de l’évasion fiscale révélée par les Panama Papers m’a aussi secoué. Je n’ai pas beaucoup la fibre de l’indignation, mais je dirais que c’est révoltant, non!